Le cannabis au travail: que faire et comment se préparer?

Avec la légalisation de l’usage de cannabis récréatif du 17 octobre dernier, plusieurs questions demeurent en ce qui a trait aux défis qu’impose cette légalisation sur les lieux de travail. En effet des inquiétudes subsistent, à savoir, comment concilier la liberté de chacun, avec l’obligation qu’a l’employeur de veiller à la santé et à la sécurité de ses employés. Alors que la loi fédérale n’encadre que peu ou pas les implications de cette substance dans les milieux de travail, la loi provinciale interdit, quant à elle, l’usage du cannabis que dans certains lieux précis comme, par exemple, les centres de santé et de services sociaux. Il est donc laissé une grande place au droit de gérance qu’ont les employeurs pour diriger leurs employés.
Bien que l’usage légal du cannabis à des fins récréatives soit nouveau, nous pouvons utiliser certains précédents mis en place par d’autres substances afin de guider les employeurs dans leurs décisions. En effet, un certain parallèle peut être fait avec d’autres substances qui peuvent induire un état second, tel l’alcool. Dans la majorité des cas, si un employé se présente en état d’ébriété au travail, celui-ci se verra imposer, à juste titre, des mesures disciplinaires pouvant aller du simple avertissement au congédiement, le tout dépendamment de la gravité de la situation. Qu’en sera-t-il avec le cannabis ?
Sachant que toutes les questions ne sont pas réglées, en tant qu’employeur vous pouvez néanmoins prendre des mesures concrètes. La mise en place de ces mesures peuvent se faire en deux étapes.
Dans une première étape, il est essentiel de se doter d’une politique interne claire, qui impose la »tolérance zéro » au cannabis sur les lieux de travail. À cela, on doit ajouter deux remarques. Premièrement, cette politique doit pouvoir s’harmoniser avec une utilisation du cannabis à des fins médicales. Deuxièmement, la « tolérance zéro » ne signifie pas congédiement automatique. En effet, la dépendance aux drogues constitue un handicap au sens de l’article 10 de la charte Québécoise.
C’est alors qu’intervient l’obligation de l’employeur d’accommoder un employé qui a soit une dépendance à cette substance, soit un besoin à des fins médicales. Toutefois, il est entendu qu’un tel accommodement ne saurait représenter des contraintes excessives pour l’employeur.
Dans une seconde étape, il est judicieux de procéder à de la formation et à de la sensibilisation auprès de vos employés quant aux dangers auxquels ils s’exposent, tant au niveau disciplinaire qu’au niveau de la sécurité au travail. Ce danger existe envers leur propre bien-être, ainsi qu’envers celui de leurs collègues.
Qu’en est-il maintenant de la possibilité d’administrer des tests de dépistage de substances? D’une part, ces tests ne comportent pas une précision aussi marquée que ceux qui détectent l’alcool. En effet, il est possible qu’un sujet teste positif tout en n’ayant plus aucun symptôme altérant son état. D’autre part, on ne saurait imposer de façon purement arbitraire des tests de dépistage, car ils constituent une atteinte à l’intégrité physique, et plus généralement, à la vie privée. Ces tests, bien que possibles, ne pourront être administrés que dans certaines situations précises. Nous pouvons penser au cours d’une enquête suivant un accident, ou suite à l’obtention de soupçons sérieux et justifiables d’utilisation de cannabis sur les lieux du travail.
Ce texte ne fait qu’effleurer l’étendue des enjeux liés au cannabis en milieu du travail, afin de vous assurer d’avoir des politiques justes et légalement applicables, le mieux est de consulter un avocat qui saura trouver la solution adaptée à vos besoins.
Me Jean-Philippe Ponce, en collaboration avec Valentin Tanasescu, stagiaire en droit
Ponce Avocat Inc.
Cet article ne constitue pas un avis juridique, pour obtenir une solution adaptée à vos besoins, veuillez consulter un avocat